avril 19th, 2012

Rappel : le principe des textes classés dans la catégorie Garbage collector veut que chaque texte soit inspiré par une chanson, l’ensemble des textes devant former un tout cohérent. Dans ma mesure du possible, la chanson est incluse en fin de texte. N’oubliez donc pas de commencer par le chapitre I au risque de ne pas tout comprendre.

Il existe plusieurs façons de sortir du sommeil. Certaines sont plus désagréables que d’autres. Pour les agréables, je laisse le soin à votre imagination de compléter le catalogue qui va de l’odeur du café chaud servi au lit à la caresse d’une bouche juste là. Voire en dessous. Un peu plus à gauche. Oui, là hmmm.

Restent les désagréables. Parmi celles-ci, et classées par ordre d’horreur croissante, on trouve successivement :

  • Le chat qui s’est mis en tête de jouer avec vos orteils. Le jeu consistant pour lui à y planter successivement griffes et dents. Lorsqu’il s’agit d’un jeune chat, c’est mieux encore, car griffes et dents sont acérées comme des aiguilles.
  • Le chien fou qui bondit sur le lit et se met à vous lécher la figure reste un classique parfois détrôné par la version « gosse avec pistolet à eau ».
  • Mention spéciale pour le gosse qui entre triomphalement dans la chambre en brandissant la bouteille de {javel|désherbant|Tabasco} dont il vient de s’enfiler une lampée, en disant « a brûle » de la petite voix de celui qui sait avoir fait une bêtise. Le temps d’ouvrir péniblement l’œil, d’apercevoir la bouteille, et on se retrouve aux urgences pédiatriques avant d’avoir compris dans quel sens enfiler son futal.
  • La plus désagréable reste sans conteste le seau d’eau. Dans la version classique, il s’agit d’eau froide, mais certains pervers utilisent de l’eau brûlante ou tout autre liquide préalablement porté à une température variant entre horriblement douloureux et brûlure au troisième degré.
  • Et, enfin, vous avez les bénis des Dieux, les bienheureux qui ont la chance d’en cumuler plusieurs à la fois.

Il y a toujours eu une catégorie spéciale pour ceux-là.

Pas les demi-dieux ou héros antiques poursuivis par le destin, les Achille, les Œudipe, les Antigone. Ceux-là, on les plaint, on disserte sur leur vie, on en fait des thèses ou des pièces de théâtre. Au fond, on les envie un peu, même s’ils en on chié méchant. Mais on n’en rit pas. 

Non, je parle de la catégorie de ceux qui se prennent toutes les petites merdes du quotidien dans la tronche. Ceux pour qui le réveil ne sonne pas le matin d’un entretien d’embauche parce qu’il y a eu une micro coupure de courant de quelques millisecondes qui a remis le réveil à zéro. ; ceux qui vont croiser la route d’un vol de pigeons diarrhéiques en allant au premier rendez-vous avec la femme de leur vie ; ceux qui vont immanquablement poser le pied sur l’unique oursin dont la présence n’était plus attestée sur ce littoral depuis la grande invasion des profanateurs de plage de 1936.

Vous voyez, ceux-là.

Ceux qui savent que, quel que soit le jour de la semaine, du dimanche au samedi,  il existe quelque part dans l’univers une merde qui attend qu’ils passent pour leur tomber sur le coin de la gueule.

Eh bien c’est moi ! C’est tout moi. C’est absolument moi.

PUTAIN DE MERDE !

J’ai poussé un hurlement, je ne sais plus bien lequel. Le second réflexe a été de sauter hors du lit pour échapper à la brûlure. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de vous lever en sursaut avec un chien de 25 kilos affalé sur votre poitrine en train de vous lécher la frite après avoir renversé le bol de café brûlant, mais le poids du chien contrarie assez le mouvement. Surtout si en même temps le greffier, surpris par une activité soudaine alors qu’il s’amusait tranquillement en profite pour vous allonger un grand coup de griffe sur les arpions. Pas qu’il n’ait rien contre vos pieds, mais bon, y zavaient qu’à ne pas se trouver là au moment où sky fallait pas.

Putain de bordel de merde c’est quoi ce souk. Troll, dégage.

J’ai réussi à repousser le chien et à me lever, à loilpé et sur un pied. Une mare de café finissait d’imprégner les draps. Calamity était pliée de rire.

  • Et vous trouvez ça drôle vous.
  • Ben oui pourquoi ? Faut pas ? Ça m’apprendra à te porter le p’tit dej au paddock. Dites donc, cher monsieur, est-ce vraiment une tenue convenable pour recevoir une jeune fille pudique et réservée? En tout cas, ya pas à dire, tu tiens encore la forme pour ton âge, dit-elle en lorgnant d’un œil intéressé.

« Tu sais ce qu’il te dit mon âge ? » lui ai-je lancé en me dirigeant à cloche-pied vers la salle de bain.

Bon, l’avantage des salles de bains est qu’on y est relativement tranquille – à la seule condition d’être célibataire et sans enfants, et que le passage sous la douche permet généralement de résorber les tumescences intempestives. Pour le reste, il faut bien avouer que les possibilités d’y trouver de quoi s’habiller sont relativement réduites. J’ai donc drapé ma dignité, ou du moins ce qu’il m’en restait, dans la serviette et regagné la chambre. Calamity avait retiré les draps tachés et la machine à laver était déjà en route.

  • Ave Caesar, cafeturi te salutant.

J’ai grogné un truc indistinct et me suis juché sur un tabouret après avoir abrité ma pudeur sous un boxer.

  • Tiens, je t’ai refait du café. Entre maman et toi, ça fait la troisième cafetière que je prépare ce matin. Dis donc, tu t’es mis au régime ? T’avais pas un cul comme ça avant.
  • On ne t’a jamais dit que les jeunes filles n’étaient pas censées remarquer ce genre de choses ?
  • Mon œil. Vous les mecs passez votre temps à mater tout ce qui passe, alors, mes excuses monseigneur, mais je ne vais pas me gêner pour en faire autant.
  • Oui, ben pas touche, je suis ton père, alors bas les pattes et pose les yeux ailleurs. Va jouer avec ceux te ton âge.
  • J’me fais chier avec les gugusses de mon âge. Une fois qu’ils ont fini de s’exciter entre eux sur le dernier jeu vidéo à la con et de se vanter des filles qu’ils n’auront pas, il n’y a rien à en tirer. Si j’ose dire. T’aurais pas plutôt un de tes copains à me présenter, dans les 40-45 ans, un qui s’entretient, avec un p’tit cul des épaules larges et un larfeuille qui soit pas aussi plat que le l’encéphalogramme du teckel de Britney Spears ?
  • Tu ne veux pas que je joue les marieuses non plus ? T’as qu’à te démerder la Pustule, je ne suis pas là pour t’aider à assouvir ta libido dopée par un afflux d’œstrogènes pré pubère.
  • Tant pis, au moins j’aurai essayé. Des fois que t’aurais pas remarqué, tes vêtements sont sur la chaise.
  • Je suis encore capable de choisir mes fringues tout seul.
  • Gna gna gna. Allez bouge papy, on va à l’hosto.
  • Eh, j’aimerais bien qu’on me laisse choisir tout seul ce que je veux faire.
  • Non, là t’as pas le choix, tu te magnes et tu caltes, et si t’essayes de faire semblant de penser que t’as pas envie d’y aller, je te jure que je ne t’adresserai plus jamais la parole.

Marie s’était redressée, poings serrés, J’ai compris que je n’avais qu’un seul choix. Et encore, à condition de mettre les pouces tout de suite, elle ne me pardonnerait pas de tarder à capituler.

  • Eh, calmos la Pustule, je n’ai pas dit que je ne voulais pas y aller, c’est sur la forme que je proteste.
  • Oui, ben tu l’avais suffisamment tout à l’heure la forme. Alors maintenant que t’es en état de rentrer dans ton falzar, tu te sapes et on décolle.

À Part grommeler, et encore pas trop fort, je n’avais plus qu’à en passer par ses 4 volontés. Dix minutes après, elle s’installait dans la voiture, lunettes de soleil sur le pif.

  • Dis, on peut s’arrêter cinq minutes pour acheter des fleurs ?
  • Ah ben quand même, je me demandais si tu allais y penser. Tu me laisseras les choisir ?
  • Yeap, comme d’hab, tu décides, tu choisis, je paye.
  • C’est pour ça qu’on t’aime, tu ne savais pas ?
  • Je me posais la question, mais si tu le dis ça doit être vrai.
  • Connard.

Elle a prononcé le dernier mot d’une toute petite voix de petite fille et a posé la tête sur mon épaule. Il m’a fallu un moment pour réaliser qu’elle pleurait. Je me suis garé sur le côté et je l’ai serrée contre moi. Ne pleure pas petit chat, ça va aller, elle va s’en sortir, on va s’en sortir tous ensemble.

C’est quand nous sommes repartis que je me suis aperçu que j’avais pleuré aussi. Je me suis senti tout con. Ce qui m’a ramené à la normale vu que c’est la sensation que j’éprouve le plus souvent.

Largement plus souvent que de me sentir intelligent.

Ça ne vous fait pas ça à vous ?

2 Responses to “Chapitre VI – Absolutely Me”

  1. Roseourenard dit :

    Un plaisir de te lire comme la miss j’ai un préférence pour cette série ! Vite la suite !!

  2. Decleec dit :

    Si.
    Ps : toujours aussi plaisant de te lire (petite préférence perso pour ta collection Garbage collector).